OEMES et ETTRES

ANS RONTIERES

NUMERO 26

Table des matières

 - EDITORIAL Bernard HAUDUC

 - LA VIE Jacqueline CENREAUD

 - LE NOEL DES PETITS VIEUX Emilienne COTTRELLE

 - FLEUR D’AUTOROUTE Christine DELFOSSE

 - LE CLOWN Jacqueline CENREAUD

 - LA MUSE André BUCHUARD

 - LE VIEIL UNIVERS A BESOIN D’AMOUR Jean-Louis ROUX

 - Extrait de "Journal d’un Désespoir " Véronique VILLARD

 - UN BOUQUET POUR NEUILLY Charles BARONCINI

 - Ecrire pour se guérir Jean-Yves Revault

 - SALUTATIONS J. Agop CUHACIENDER

 - DES SYLLABES Marcel BRUN

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EDITORIAL

MARjan

L’été dernier a emmené Marjan, le poète connu de tous, dont les poèmes apparaissaient dans une grande variété de revues.IL avait choisi ce pseudonyme en 1949, le créant à partir de la première syllabe de son prénom et de celle de son épouse. Auteur inlassable, il écrivait alors que ses doigts ne s’y prêtaient plus. Tous les domaines de la vie, il les abordait.

Les premiers échanges poétiques que j’ai pu avoir avec Marjan remontent aux années soixante. L’homme qu’il était alors n’a pas changé jusqu’à nos jours IL a créé un style , une façon d’écrire à partir de sa vision de la vie qu’il rêvait plus belle. Mais c’était sa vision personnelle et c’est ce qui a fait éclore son style. Avec son humour il détournait le quotidien et tout ce qu’il n’aimait pas.

IL appréciait chaque lettre, chaque envoi de recueil et ne manquait jamais de remercier, ni d’envoyer un compliment pour un auteur. Ainsi, en 1995 il m’écrivait : " Merci pour -Détours d’Ame- de Christine Delfosse dont la poésie humaine m’a enchanté. C’est très bon. Dites le lui de ma part " . Ce recueil publié dans la série -Les Mains Vivantes- avait vu également la publication de son recueil -Marjan Circus-. Ses compliments ont porté ses fruits puisque Christine Delfosse, en plus de l’écriture , a créé -Lithurge Editions. Combien d’auteurs, de revues ont pu ainsi, au fil des années bénéficier des compliments et des encouragements de Marjan.

MARais

L’automne emporte aussi les poètes ; automne 1963 Jean Cocteau, automne 1998 Jean Marais. L’on ne peut penser à l’un sans penser à l’autre. L’amour de l’art les unissait par-dessus tout, la poésie, le théâtre, le cinéma, la peinture, le dessin, la sculpture. Comme tout ce qui touche à l’art devient immortel ,car création de l’esprit, par contraste aux créations de l’intellect qui périssent rapidement, l’oeuvre de Cocteau incarnée par Jean marais deviendra une légende. Ne parle-t-on pas toujours d’Homère ?

Jean Marais aimait la vie, tout comme il aimait jouer au théâtre ou tourner au cinéma. L’homme et l’acteur se confondaient. Sa bonté, son amour de la vie, irradiaient dans tout ce qu’il réalisait. C’était un homme comme on aimerait en rencontrer plus souvent.

Je l’avais convié en 1985 à une présentation/dédicace des ouvrages de Jean Cocteau et de ses propres écrits, car il écrivait aussi. Souriant, simple, agréable, convivial, il répondait à toutes les questions avec bonne humeur, tout en apposant ses dédicaces. IL était si lié intérieurement à Jean Cocteau qu’il dédicaçait de son propre nom ,Jean Marais, les ouvrages du poète disparu en 1963.

Cette bonne humeur, son sens d’une certaine noblesse de coeur, nous la retrouvons dans des films comme le Capitaine Fracasse,la Belle et la Bête, le Bossu, le Capitan. IL incarnait toujours un être bon, généreux, courtois, défenseur des opprimés, ce qu’il était dans la vie.

Jean Marais est un homme où les qualités de coeur dépassent de loin, grand nombre d’hommes, célèbres par leur intellect. Je n’ai pas commis d’erreur de conjugaison en disant " est ", car nous savons bien que la mort n’est qu’un passage, que notre habit de chair nous ne pouvons l’emmener. Comme dit le Petit Prince " j’aurai l’air d’être mort, mais ça ne sera pas vrai..... ce sera comme une écorce vide ".

Jean Marais est désormais dans la sphère des poètes, des artistes, cette famille spirituelle qui rayonne l’Amour de l’Art.

Peu connu pour ses écrits, je vous propose un de ses contes publié il y a une vingtaine d’année.

Bernard HAUDUC

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LA VIE

La vie est ici, la vie est là !
Partout on la retrouve !
Le trépas même ne la retient.
Au delà des yeux, elle est toujours présente,
Dans l’éternité, elle continue sa marche !
Elle est l’optimisme indéfectible
Qui se perpétue au delà de la tombe,
Car la mort n’existe pas,
Ceux qui s’en sont allés,
Sont partis vers un autre monde,
Et ce monde, c’est DIEU qui l’a créé.

Jacqueline CENREAUD

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LE NOEL DES PETITS VIEUX

Ils se regardent et pensent :
Encore une année qui s’en va,
Rien ne comblera leur absence
Ils ne seront pas là.

Que la vie était belle
Lorsqu’autour de la table rassemblée
La bruyante ribambelle
Ouvrait les cadeaux ficelés.

Trop vite ils ont grandi ;
A droite, à gauche dispersés
Chacun a fait sa vie,
Il vaut mieux n’y pas penser.

Ce soir, c’est Noël,
Et, pour qu’il soit heureux
Elle a mis la nappe de dentelle
Et préparé un repas d’amoureux.

Elle a allumé deux chandelles,
Il apporte une bouteille de vin vieux
Qui mettra dans leurs yeux des étincelles
Et les rendra un peu joyeux.

Il a remis une bûche dans la cheminée
Et rapproché les deux fauteuils ;
La pièce s’est illuminée
En un signe d’accueil.

Elle paraît si fragile
Enfouie dans les coussins
Qu’il reste d’abord immobile
Puis, lui tend les mains.

Il la prend sur ses genoux
Comme autrefois, dans leur jeunesse,
Elle noue ses bras autour de son cou
Le coeur plein de tendresse.

Longtemps il la berce de mots
Qu’il n’avait plus jamais prononcés,
Ils s’écoulent comme un flot
Trop retenu pendant des années.

C’est une musique d’amour
Qui, en cette nuit de Noël
Rapproche leurs coeurs lourds
Et les mène vers l’Eternel.

La bûche se consume,
La chandelle s’éteint,
Les heures ont passé, une à une,
Voici venir le matin.

Emilienne COTTRELLE Montry, le 14 Décembre 1989

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FLEUR D’AUTOROUTE

C’était un beau matin de printemps,
un peu avant les vacances.
Elle est née comme naissent les fleurs,
Au milieu de milliers de brins d’herbe,
Nourrie par la tendre rosée du matin.
Je l’ai vue défroisser sa robe pourpre
et déployer la dentelle de son jupon blanc.
C’était juste avant la grande autoroute...
Puis j’ai vu venir les hommes,
les camions et les pelleteuses.
Je ne sais pas comment,
Mais elle a survécu dans le vacarme
Et le parfum angoissant du carburant.
Puis les hommes sont passés,
poussant de grands rouleaux
pour aplanir la terre,
Et je l’ai vue se coucher
dans sa robe déchirée
et son jupon un instant s’est soulevé,
dévoilant son coeur broyé.

Puis je l’ai vue disparaître
sous le goudron.

Christine DELFOSSE

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LE CLOWN

Vêtu de son bel apparat,
En le voyant, chacun l’applaudira !

Avec sa perruque et son joli nez rouge,
Il va, il vient, il bouge !

Il est comique,
Avec sa voix et ses mimiques !

Si rigolo,
Sous son petit chapeau !

Muni de ses cymbales,
Faisant un bruit infernal,

Vers la piste, il s’avance,
Rythmant la cadence,

Jonglant dans l’intervalle,
Avec les balles !

Effectuant sans cesse,
De vraies prouesses,

Faisant des pirouettes,
Jouant de la trompette !

Par ses gestes,
Comme il est leste,

Et pourtant maladroit,
Tout à la fois !

Cependant, sous son sourire,
Parfois, le clown soupire !

Dans son pauvre rôle,
Doit toujours être drôle !

Et chaque fois,
La même scène il doit,

Pour gagner son pain,
Jouer, chaque matin.

JACQUELINE CENREAUD

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LA MUSE

Depuis bien longtemps le poète ne pensait plus à la muse inspiratrice.
Dans son coeur ,dans son âme il n’y avait plus rien.
Comme il est écrit : " il avait la mort dans l’âme " et plus rien ne vivait en lui.
Seul, son intellect lui servait de bouée,car avec elle au moins il avait l’impression d’exister.
IL se leurrait,mais n’y prenait garde tant son monde subjectif lui servait de guide, de repère pour asseoir sa certitude en se disant : j’existe !
Mais la vie répond aux attentes et balaie ce qui est construit sur du sable.
Les fondations ne tiennent pas et comme une tempête déracine elle renverse le poète pour lui rappeler qu’il a oublié son âme, au détour d’un chemin.
Un jour de grand froid, alors que le poète transi, le regard dans la brume hivernale ne recevait plus l’inspiration,la muse est apparue.
Le coeur du poète s’est remis à battre,l’illusion de son intellect s’est évanouie comme le font les mirages et l’âme du poète s’est remise à vibrer.
L’amour a inondé chaque cellule de son corps, la muse lui parlait, la muse unie à lui faisait du poète comme un androgyne.
Séparés par la distance, mais unis par la présence la muse et le poète vibraient, vibraient.
L’âme du poète chantait, l’âme du poète louait le ciel, car là-haut ils étaient ensemble.

Depuis bien longtemps, le poète avait perdu sa muse inspiratrice, mais un jour de grand froid l’inspiration revint.
Une nouvelle muse si inattendue et tant attendue lui parlait, unissant à lui son énergie d’amour.
Leurs mains séparées, éloignées étaient unies.
L’instant merveilleux n’en finissait pas ,n’en finit pas, un vieux monde s’écroule pour laisser place à l’amour, l’amour du coeur où chaque mot vibre, où chaque mot s’incarne.

Au commencement était le Verbe et le poète conjuguait, conjugue le verbe aimer.

Muse, muse, tu es la clé au bonheur.
Muse, muse, tu es la clé au ciel.

Muse, muse, je t’aime
muse, muse, je m’amuse
muse, muse, je t’amuse.
Nos rires enlacés vibrent dans l’air du zodiaque, nos pensées, nos paroles vibrent dans mes cellules ranimées.

Muse, muse ...
Muse, muse ....
Au commencement était le Verbe,
Muse, muse je te conjugue,
muse, muse ...
muse, muse ...

André BUCHUARD 2 Décembre 1998

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LE VIEIL UNIVERS A BESOIN D’AMOUR

-Toi qui va naître sur la Terre
A l’heure de l’ère nucléaire
Prends bien garde mon cher enfant
A stabiliser tes sentiments
IL est meilleur d’aimer ses parents
Que d’vouloir taquiner l’ouragan

-Le vieil univers a besoin d’amour
Afin qu’les rivières coulent toujours
Du Nord au Sud de l’Ouest à l’Est
Du Sud à l’Est du Nord à l’Ouest

-La femme qui te portes t’aime déjà
Alors qu’elle ne sait c’que tu seras
Prends bien garde mon cher enfant
C’que tu vas voir est un peu troublant
Mais n’fait pas de ta mère un tourment
La mort n’a pas de chaînon manquant

-Le vieil univers a besoin d’amour
Afin qu’les rivières coulent toujours
Du Nord au Sud de l’Ouest à l’Est
Du Sud à l’Est du Nord à l’Ouest

-Je ne suis l’ange missionnaire de Dieu
Seulement j’crois qu’ce problème est sérieux
Prends bien garde mon cher enfant
A naviguer qu’sur la gloire des gens
Trop de personnes refusent ce temps
Où l’ironie et mort s’adaptent aux ans

-Le vieil univers a besoin d’amour
Afin qu’les rivières coulent toujours
Du Nord au Sud de l’Ouest à l’Est

Du Sud à l’Est du Nord à l’Ouest....

Jean-Louis ROUX

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Extrait de "Journal d’un Désespoir "

Cette nuit, j’ai tenu ma promesse.
Je n’ai pas tenté une seule fois
de me glisser entre les draps ;
néanmoins j’ai occupé le canapé.
Puis, aux premiers soupirs de l’aube,
j’ai enfin réussi à m’endormir.
Brusquement.
Alors que je n’y croyais plus.
Certes j’ai peu dormi ;
cependant ce repos inattendu
m’a permis de recouvrer quelques forces.

Vais-je en profiter pour sortir ?
Mais pourquoi faire ?
Une fois dehors, ne vais-je pas retrouver
mon état initial,
mon immuable apathie.

J’ouvre la fenêtre.
L’air est doux. Une délicate odeur me parvient.
Pourtant cette senteur m’incommode,
me donne la nausée.
Comment apprécier la renaissance du printemps
alors que tu reposes définitivement
dans les ténèbres.
Toi dont la présence me comblait,
toi qui avais la peau si tendre
et le sourire si frais.

Véronique VILLARD

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UN BOUQUET POUR NEUILLY

Dans le bois de Boulogne, nous avons cueilli
Quelques fleurs sauvages, un bouquet pour Neuilly,
Fleurettes, blanches, bleues, qui, c’est bien l’essentiel,
Atténuent, quelque peu, l’aspect résidentiel
De notre appartement, dans l’avenue De Gaulle
Le flot des voitures font une course folle
Car, de l’Etoile à l’Arche, elle est l’unique lien
Baudelaire, dit-on, y promenait son chien...
Et le roi Henry, tout en haut, dans la Seine
Faillit perdre sa vie, son carrosse et la reine !

Nous sommes loin d’Esbly, du jardin de Grand-Père...
Mais, plaine des Sablons, de la pomme de terre
Que créa Parmentier, peut s’inspirer ma rime...
Tout autour de Longchamp, nos vélos, loin des cimes,
Tournent dans le parcours d’un circuit en dentelle
Et puis, nous revenons chez nous, par Bagatelle...
Dans le bois de Boulogne, nous avons cueilli
Quelques fleurs sauvages, un bouquet pour Neuilly...

Charles BARONCINI Neuilly, mai 1997

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Ecrire pour se guérir de Jean-Yves Revault - Editions 3 Fontaines

(Les pouvoirs de l’écriture.) - Ecrire,c’est vivre,partager,renaître.
Jusqu’où peut aller la magie de l’écriture ? Peut-elle nous libérer de nos " bleus à l’âme ", de nos traumatismes et frustrations anciens, de nos manques d’amour ?
Voici quelques-unes des questions auxquelles cet ouvrage tente de répondre. De nombreux témoignages illustrent d’ailleurs les théories esquissées. ILs aident à comprendre comment écriture-mémoire et écriture-fiction se rejoignent et se complètent pour permettre à chacun(e) de relever son défi personnel d’une vie plus libre et plus épanouie.
Oui, tout est possible avec l’écriture : réparer le passé, inventer l’avenir, construire le présent. Ecrire encore et toujours, comme une respiration, une poussée de la vie en soi. Ensuite, ce n’est plus qu’une question de confiance : Laissons faire la vie !
Une présentation très pratique des principales techniques d’écriture (lettres symboliques, écriture de fantasmes, écriture anamnésique, écriture primitive...) pour que chaque lecteur puisse " entrer " en écriture.

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SALUTATIONS

ROUGE COQUELICOT
SONGE AU BLEU DE TES YEUX
MAUVE DIMANCHE
IL PLEUT
POUR OFFRIR LES ROSES
DU CIEL JALOUX
ET
DU JAUNE PRINTANIER
NAQUIT
LE VERT REPLIQUE DES CHAMPS
LUNDI GRIS
NOIR DES NUITS
BLANC DES JOURS
L’EAU SE DECOLORE
L’HORIZON SE DEGUISE
L’ARC EN CIEL JOUE
AU MAGICIEN
POUR QUE MON REGARD
EPOUSE LE TIEN
MARDI MERCREDI OU JEUDI
LES COULEURS CHANTENT
L’HYMNE DE L’INSTANT
SALUTATIONS
DANS LA ROSEE
MULTICOLORE
DE NOTRE RENCONTRE
DEVINETTE DE LA NATURE
ET MON COEUR AIME CA
LE ROUGE ET LE BLEU VENDREDI
A TES YEUX BLEU ORANGE
JE PRESENTE CE SAMEDI
MES PLUS SINCERES
COQUELICOTS JAUNES

Jacques Agop CUHACIENDER

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DES SYLLABES

Sans parler de mesure, de cadence, de nombre, de brèves ou de longues, de pieds, de temps forts ou de temps faibles, je dois dire que le rythme des vers français est essentiellement lié au nombre de syllabes qui les composent.

Dans le nombre de ces syllabes, tout e muet élidé dans le corps du vers, ou terminant le vers, ne compte pas pour une syllabe. D’ailleurs le "PETIT LAROUSSE" définit fort justement la syllabe comme étant : "une ou plusieurs lettres qui se prononcent dans une seule émission de voix".

Compte tenu de cette définition et de ce qui la précède, dans l’exemple suivant, chaque syllabe est séparée. Les plus longues (par le système de l’élision) sont soulignées. Leur total étant de douze, il s’agit d’un alexandrin.

Le/po/è/me en/tre en/nous/com/me un/par/fum/de/roses.

Selon le nombre de syllabes dont ils sont formés, les vers sont dénommés :

a) monosyllabes : vers d’une syllabe.
b) dissyllabes : vers de deux syllabes.
c) trisyllabes : vers de trois syllabes.
d) tétrasyllabes : vers de quatre syllabes.
e) pentasyllabes : vers de cinq syllabes.
f) hexasyllabes : vers de six syllabes.
g) eptasyllabes : vers de sept syllabes.
h) octosyllabes : vers de huit syllabes.
i) ennéasyllabes : vers de neuf syllabes.
j) décasyllabes : vers de dix syllabes.
k) hendécasyllabes : vers de onze syllabes.
l) dodécasyllabes, ou alexandrins (1), ou hexamètres, ou vers héroïques : vers de douze syllabes.

Le poème ci-après, souvent cité, allant de l’alexandrin au monosyllabe, illustre à lui seul ces différentes mesures.

O mort, viens terminer ma misère cruelle!
S’écriait un jour, dans un sombre transport,
Le pauvre Charles accablé par le sort.
La faux en main, accourt la mort.
S’empressant à la voix qui l’appelle,
Me voilà prête dit-elle,
Or çà de par Pluton,
Que demande-t-on ?
Je veux, dit Charles,
- Tu veux ! Parle.
- Eh bien !
Rien.

Il y a également des vers de 13 à 24 syllabes dont je parlerai par ailleurs, mais leur emploi n’est pas à conseiller. Le débutant devra d’efforcer seulement d’écrire des poèmes en alexandrins, ou mieux en octosyllabes : il n’en est pas de meilleur pour initier à la science du rythme.

Mais revenons à la syllabe. On a beaucoup discuté a son sujet, et tout ce que l’on a pu dire et arrêter n’a été valable qu’un temps et pour une région considérée, puisque la prononciation est essentiellement variable. C’est ainsi, par exemple, que jusqu’au VIIème siècle FLEAU actuellement dissyllabique, se prononçait FLEAU en une seule émission de voix. Depuis des temps le mot AOUT a été et demeure encore dissyllabique pour certains, monosyllabique pour d’autres. On ne peut que le regretter, mais, chacun étant de bonne fois, la tolérance s’impose.

Ce qui toutefois ne me paraît pas tolérable est l’emploi par le même poète de consonances différentes pour un même mot : la paresse seule y trouve son compte, et l’on ne peut que regretter de trouver chez Musset, par exemple : " Marqué du Fou-et des Furies " et " J’oserais ramasser le FOUET de la satire " chez Hugo : " Sur la terre où tout jette un MIASME empoisonneur " et " Mêlé leur sépulcre au MI-ASME insalubre ", chez Coppée : " De sa vue, HIER encor, je faisais mon délice " et " Or, ce fut HI-ER soi, quant elle me parla " etc... Les imiter en cela ne pourrait qu’être une faute.

Il est d’ailleurs évident que de tels procédés n’ont rien à voir avec les prononciations locales dont les poètes classiques ne voulaient pas tenir compte. Conscients peut-être des indiscutables inconvénients que ces différentes prononciations apportaient à la poésie, leur décompte de syllabes restait basé sur l’étymologie latine. Dans leur majorité, les poètes classiques contemporains ont conservé cette tradition. Il s’ensuit inévitablement de flagrantes contradictions avec l’usage courant et, pour peu que l’on continue à refuser l’évolution, on finira par opter pour une langue morte qui naturellement s’intellectualisera... en s’éloignant de la poésie. Il importe de le signaler, afin que nos poèmes ne soient pas purement cérébraux. Même si pour certains leur lecture est parfois mal sonnante, ils ne seront pas les poèmes d’une chapelle de conservateurs, mais ceux qui toucheront parce que bien vivants.

Je ne suis d’ailleurs pas le seul à prendre cette position, puisque Maurice Grammont disait fort justement déjà dans son " PETIT TRAITE DE VERSIFICATION FRANCAISE ", publié en 1940 mais malheureusement introuvable actuellement en librairie comme tous ceux qui ont tenté de rajeunir intelligemment notre prosodie : " ...la plupart des mots n’ont qu’une seule prononciation. Il est déconcertant d’être obligé de les prononcer en vers tantôt d’une manière, tantôt d’une autre ; et il est particulièrement choquant de leur imposer parfois une prononciation que la langue n’a jamais connue ou dont elle a perdu le souvenir depuis sept à huit siècles. C’est cela surtout qui donne à notre poésie un caractère artificiel et l’éloigne tous les jours davantage de la langue réelle. Il n’y a qu’un principe admissible pou le compte des syllabes : se conformer le plus possible à la prononciation de la langue vivante. La poésie de l’ancien français faisait ainsi ; la poésie d’aujourd’hui doit faire de même et tenir compte des changements qu’a subis la prononciation. " On ne saurait mieux dire.

Marcel BRUN (Les Techniques de la Poésie Classique)

(1) - Ce vers a été nommé alexandrin pour avoir été mis en honneur au douzième siècle par Alexandre de Paris ou de Bernay, dans son " ROMAN D’ALEXANDRE ".

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